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Kasai Direct
10 mai 2012

Matata Ponyo reconduit les « matata » des IFI chez nous

Les Grecs sont allés dans la rue et ont voté contre les partis politiques ayant appliqué les mesures d’austérité prônées par la troïka (le FMI, la Banque centrale européenne et le Commission européenne). Ils ne veulent pas perdre complètement leur souveraineté politique et économique. Les Français ont voté contre Sarkozy pour éviter que ses accointances avec Merkel ne conduisent leur pays à la catastrophe. Les Espagnols, les Portugais, les Italiens, etc. peinent à rompre avec les conséquences des mesures d’austérité imposées à leurs gouvernants. Curieusement, au Congo, « les honorables députés » avalisent un « coup d’Etat administratif » en acceptant que Matata Ponyo obéissent aux directives du FMI et de la Banque mondiale. Le monde à l’envers ! Ils acceptent que Matata Ponyo reconduisent « les matata » ,  les souffrances que ces IFI nous ont imposées depuis les années 80. Ignorance et cupidité quand vous nous tenez !
 
Bien que victimes d’un coup d’Etat administratif après les élections de novembre et décembre 2011, les minorités organisées  et agissantes devraient s’en tenir au devoir patriotique de la vigilance. Elles devraient demeurer attentives à la façon dont les bénéficiaires de ce coup d’Etat voudraient mener davantage le pays, notre patrimoine commun, à la dérive.  Pendant que la guerre de prédation bat son plein à l’Est  pour transformer définitivement cette partie de notre pays en un morceau du marché de l’Afrique de l’Est, à Kinshasa, les débats, chez les bénéficiaires dudit coup d’Etat et leurs clients, tournent autour du programme de gouvernement de Matata Ponyo pour les cinq ans à venir. A y regarder de plus prêt, ce programme tourne autour de deux axes principaux : l’amélioration du climat des affaires et la reconduction de l’Initiative des Pays Pauvres Très endettés comme sous Gizenga et Muzito ; c’est-à-dire l’application du Consensus de Washington et des mesures d’austérité au Congo. Contrairement aux apparences, c’est un programme fondamentalement extraverti.
Pour cause. Qui dit amélioration du climat des affaires dit libéralisation, dérèglementation et privatisation. C’est-à-dire privilège accordé à la suprématie du marché et non à la souveraineté  économique et politique au pays. Initié à Lyon en 1996 au sommet de G7, l’IPPTE « est le dernier mécanisme conçu par la communauté des créanciers à l’intention des Etats surendettés en vue de parachever leur conversion rapide à l’économie de marché. Elle consiste en des rééchelonnements successifs de la dette pour les pays ayant réalisé de façon durable de « bonnes performances » selon les critères des IFI. » (A. TRAORE, Le viol de l’imaginaire, Paris, Fayard, 2001, p.46). Qu’est-ce que cette façon de procéder à comme corollaire ?  Lisons encore Aminata Traoré : « Puisqu’elle prévoit que le FMI et la Banque mondiale décident de l’éligibilité d’un pays, elle tend à institutionnaliser l’ingérence politique. Les Etats concernés se trouvant pris en tenailles entre une demande sociale forte et l’exigence de réduction des dépenses publiques pour répondre aux recommandations des créanciers. » (Ibidem) Pour dire les choses autrement, il est quasi-impossible de s’inscrire dans la logique de l’IPPTE et d’augmenter les salaires de la fonction publique, de créer des emplois décents dans la fonction publique, de financer convenablement l’éducation nationale, la santé, le logement social, etc. Les sceptiques peuvent étudier les sources du financement du programme de gouvernement de Matata Ponyo. En plus de ressources internes ( ?), ce programme mentionne les ressources additionnelles (PPTE, ct.) et les ressources provenant des partenariats avec les institutions multilatérales (FMI, BM, BAD, etc.) Il évoque aussi le troc : la construction d’infrastructures contre échanges des ressources naturelles. (Il reconduit le principe des contrats léonins semblables à ceux signés entre certaines entreprises chinoises et les gouvernants précédents.)
Il est quand même curieux qu’au moment où, en Europe, les gouvernements ayant avalisé les mesures d’austérité prônées le FMI, la Commission Européenne et la Banque centrale européenne tombent les uns après les autres, nous puissions avoir au Congo, des « députés » soutenant un programme de gouvernement fondé sur les mêmes mesures (plus le troc de nos matières premières) ! Le plus curieux est que dans les débats, il n’y ait pas eu- à notre connaissance- un simple rapprochement entre ce qui se passe en Grèce, en Espagne, au Portugal, en Italie et peut-être bientôt en France et ce programme néolibéral de Matata Ponyo !
Chez nous,  « les honorables », dans leur immense majorité, voudraient juger sur les faits. Ils sont donc incapables de prévoir les faits à partir des moyens  auxquels ledit gouvernement va recourir pour exécuter son programme. Là, il y a quelque chose qui ne va pas et cela fondamentalement. Dison brièvement que du point de vue économique, Matata Ponyo ne fera pas mieux que Gizenga et Muzito : il applique la même politique économique néolibérale que ses prédécesseurs.  Il est plus ou moins sûr que  l’application de ce programme contribuera à l’enrichissement sans cause d’une poignée d’élites compradores ; notre peuple n’y trouvera pas son compte. Ses droits économiques, sociaux et culturels ne seront pas respectés. Le recours à la violence, à la guerre, à la violation massive des droits de l’homme et à la manipulation médiatique sera permanent pour éviter que les plus éveillés de ce peuple n’usent de leurs droits et libertés fondamentales pour décrier les mesures d’austérité reconduites par Matata Ponyo. (Demander à Matata Ponyo de s’impliquer pour que cesse la violence dans notre pays, c’est couper la branche sur laquelle il est assis, la loi de la guerre de tous contre tous sur laquelle est fondée le néolibéralisme.)
 Pouvait-il en être autrement ? Non. D’un processus non-conforme à la vérité et à la justice, il est difficile de tirer des institutions citoyennes au service de la vérité, de la paix et de la justice sociale.
Avouons que comme tous les autres pays du monde subissant les diktats des IFI et des oligarchies d’argent, le Congo (RD) notre pays, connaît des problèmes structurels intenses, à commencer par celui de l’existence d’un Etat républicain. Depuis la guerre de prédation et de basse intensité qui nous est livrée par « les cosmocrates » et  leurs nègres de service, notre pays est devenu une jungle où règne la loi du plus fort. Les minorités agissantes et organisées l’ont suffisamment bien compris. Comme des fourmis, elles travaillent à leur redynamisation, à la résistance contre les forces mortifères et à la réinvention d’un autre Congo. Cela prend du temps et c’est normal : nous luttons contre un système néolibéral cynique et bien outillé par ses « petites mains ».

J.-P. Mbelu

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