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Kasai Direct
7 janvier 2014

Numbi en rupture ouverte avec J. Kabila

A la veille du Nouvel an, le 30 décembre 2013, Kinshasa bascule soudain dans la violence. Des armes ont commencé à crépiter dès les premières heures de la matinée.

Elles se font entendre simultanément sur trois sites, à La cité de la voix du peuple, le QG de la RTNC -la télévision publique réputée monolithique- à l’état-major général de l’armée à Ngaliema et à l’aéroport international de Nd’jili. Le tout synchronisé avec Lubumbashi, Kolwezi et Kindu où ça a tiré quasiment au même moment. Un nom est mis en avant, le pasteur Paul Mukungubila, candidat malheureux à l’élection présidentielle de 2006 connu comme un opposant au régime de Joseph Kabila. Un nom et plusieurs hypothèses avancés sur le comment et le pourquoi de ce qui passe pour une tentative de renversement du régime, sinon une opération pour sémer le doute dans les esprits quant à la solidité du pouvoir de Joseph Kabila ou simplement jeter l’opprobre avec le raccourci d’un penchant affiché pour les Rwandophones. La rédaction de «CONGONEWS» s’y est mise aussi. Un véritable travail de fourmi pour rassembler les différents éléments du puzzle. Comme des criminologues dans une phase de reconstitution de la scène du crime.

Première question à laquelle il fallait trouver une réponse: QUI? Les assaillants eux-mêmes ont affirmé, sur le plateau de la RTNC, agir au nom et pour compte de Paul Mukungubila. Ce que l’intéressé lui-même a revendiqué depuis l’Afrique du Sud. A l’analyse, cette revendication ne résiste pas. D’abord l’ampleur de l’opération déployée de manière simultanée dans trois provinces et sur six théâtres laisse penser à une vaste machine loin au delà des capacités d’un gourou «illuminé» à la tête d’une «église» d’à peine quelques centaines de fidèles. Ensuite, les premières interviews à la presse du présumé instigateur ont trahi une absence totale de ligne directrice et de contenu doctrinaire pour un coup de cette envergure. Ses partisans ont montré la même carence à la RTNC. Ils ont bénéficié de plus de cinq minutes de temps d’antenne en direct sur le plateau avant la coupure du signal. Ils n’ont fait que menacer des journalistes pris en otage de lire un message là où la tradition est à la lecture, séance tenante, de la déclaration de prise de pouvoir, de la part du nouveau pouvoir de fait lui-même ou de son porte-parole.

Le seul message capté de ces «pseudo-putschistes» reste une manifestation de joie de l’un d’entre eux, en live, comme quoi que c’est fini le pouvoir des Rwandais. Même rengaine à Kindu où il a été répété que c’est fini la présence des Rwandais dans les institutions, l’armée et la police. Rwandais pour dire Banyamulenge et autres Tutsi congolais. Toujours sur la vacuité de la démarche mukungubiliste, chez «JEUNE AFRIQUE», par exemple, Mukungubila a parlé de ses «frères désarmés» descendus dans la rue pour exprimer leur ras-le-bol. Curieux que les manifestants mukungubilites désarmés aient pris pour cible, entre autres, le centre névralgique de l’armée, son quartier général si discrètement logé, en cohabitation avec le ministère de la Défense, sur les hauteurs de Mont-Ngaliema que beaucoup de Kinois n’en connaissent pas la localisation. C’est plus tard, dans une interview au quotidien «LE MONDE» que Mukungubila a donné de la consistance à son discours pour affirmer que «Joseph Kabila doit partir». Il a donc évolué comme s’il était coaché au fur et à mesure par les vrais commanditaires, ceux-là qui lui ont attribué un rôle en raison de certaines contraintes et de la symbolique à cristalliser autour d’une rupture entre Joseph Kabila et l’arrière-base balubakat.   

Même lorsqu’il met en avant le départ de Kabila, Mukungubila pense l’obtenir par quelle méthode? Avec une poignée des partisans désarmés? La nature de sa lutte est très floue. Elle met en scène des kamikazes d’un type nouveau qui n’ont rien à voir avec les «human bomb» du Hezbollah ou encore les pilotes suicidaires japonais de la deuxième Guerre mondiale. Aussi flou, le profil des hommes avec lequels Mukungubila prétend désormais renverser le pouvoir. Si c’est avec les mêmes qui ont présenté, comme sur les planches, un simulacre de coup de force à la RTNC, il faudra parler d’amateurisme criant. D’où une question: comment des amateurs -une trentaine (selon la version officielle) de civils armés des gourdins ont réusi à pénétrer avec autant de facilité dans les installations de la RTNC, protégées par un double cordon sécuritaire de la Garde républicaine, le premier aux deux entrées de l’enceinte et le second, à l’entrée du bâtiment qui mène à la rédaction et au studio.

De là à penser qu’il y a eu des complicités, le pas est vite franchi. Certaines sources ont parlé d’un relâchement que les assaillants ont mis à profit au moment même de la relève des éléments de la Garde républicaine commis à la sécurité de la RTNC. Soit, les «frères» de Mukungubila sont entrés et il y a eu plusieurs morts dont deux victimes au faciès tutsi, selon des texto échangés entre bonzes de la majorité, dénombrées parmi les assaillants au QG de l’armée. Les mêmes sources ont fait passer ces deux morts pour le chauffeur et le garde du corps du Général Charles Bisengimana, le chef de la police confirmé dans ses fonctions dans les dernières ordonnances du Chef de l’Etat. Démenti formel de la part des proches de Bisengimana qui affirment que le chauffeur de l’inspecteur général, un certain lieutenant Innocent, est bel et bien en vie. Quant au garde du corps supposé abattu, il fallait l’identifier pour vérifier parmi les hommes de la garde rapprochée de Bisengimana.

Il y a alors lieu de parler d’un montage. De la part de qui? C’est ici que des sources font état d’une confrontation larvée mais sans merci entre deux limbes du pouvoir, le clan balubakat -les balubakat du territoire de Malembankulu chez Jean-Claude Masangu et le camp des Rwandophones. La confirmation de Bisengimana à un poste occupé par le passé par John Numbi aurait aggravé le malaise. Du coup les uns auraient décidé de démontrer qu’ils peuvent faire vasciller le pouvoir à tout moment. La sortie de Numbi dans le Journal parlé de Radio Okapi à 12 heures, le Ier janvier 2014, y a rajouté, sortie dans laquelle l’ex-patron de la police a minimisé la situation, affirmant que c’est une rigolade que des civils armés des gourdins entreprennent une action pour renverser le régime.


Il a banalisé là où le pouvoir a voulu dramatiser avec une publicité assurée via une visite des députés sur le théâtre des affrontements à l’issue de laquelle les différentes déclarations ont fait croire à une action subversive d’envergure enrayée dans un bain de sang. Déjà que cette sortie médiatique fait problème de la part d’un Général suspendu, donc d’active et non à la retraite. Un Général, ça ne parle pas, surtout pour donner une opinion sur une question d’ordre politique. Une exception en la matière ne peut être prise que pour un parti pris sur fond d’un défi à l’endroit de l’autorité. Encore que Numbi n’avait jamais fait de déclaration publique depuis sa suspension, même lorsque Lubumbashi, où vit le même Numbi, avait connu la terreur des Bakata-Katanga. Son nom avait été cité sans provoquer une réaction de sa part.
SAMUEL MBUTA

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