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27 novembre 2011

Congo: Une campagne électorale léonine /LA LIBRE BELGIQUE

Marie-France Cros, Envoyée spéciale à Kinshasa
Mis en ligne le 26/11/2011
Disproportion de l’accès aux médias, inégalité de traitement en cas de violence, esprit partisan affiché à la CENI : la campagne électorale est dominée par Joseph Kabila.
Avant même les scrutins présidentiel et législatif de ce lundi, la campagne électorale est d’ores et déjà entachée par son caractère léonin, favorisant très largement le président sortant, Joseph Kabila, et les candidats députés de la majorité présidentielle.
Outre le déséquilibre dans l’accès aux médias (voir « LLB » du 25/11) et la modification de la Constitution à son avantage (faisant passer la présidentielle de deux à un tour) en janvier dernier, le président Kabila bénéficie d’autres avantages dans la course.
Ainsi la Commission électorale nationale indépendante (CENI) est constituée de quatre personnes désignées par la majorité présidentielle et de trois choisies par l’opposition; elle est présidée par le pasteur méthodiste Daniel Ngoy Mulunda, parent du chef de l’Etat et cofondateur de son parti, le PPRD. Dans la salle d’attente du pasteur Ngoy, à la CENI, sont diffusés en continu les programmes d’une chaîne de télévision, Télé50, consacrés uniquement à la propagande en faveur de Joseph Kabila et ses alliés, entrecoupée – sur une durée de près de cinq heures où nous y avons séjourné – par deux journaux télévisés évoquant essentiellement les activités électorales du chef d’Etat sortant et par une revue de presse concentrée sur les titres favorables à ce dernier.
Le chef de l’Etat utilise en outre les moyens de l’Etat (véhicules, hélicoptères et avions du gouvernement) pour mener sa campagne, notamment sous couvert d’une multiplication d’inaugurations en tout genre. L’Article 36 de la loi électorale précise que « l’utilisation des biens, des finances et du personnel public [ ] est punie de radiation de la candidature ou d’annulation de la liste du parti politique ou du regroupement politique incriminé » . L’UDPS a déposé plainte sur base de cet article contre Joseph Kabila mais personne, à Kinshasa, ne croit que la CENI radiera ce dernier.
 
L’opposition a aussi été victime d’interdiction de survol ou d’atterrissage pour entraver la campagne de ses candidats. Certains de ceux de l’opposition ont parfois du mal à se déplacer en province pour faire campagne, toutes les places d’avion ayant été retenues par le camp présidentiel.
Des journalistes couvrant des manifestations d’opposition ont été interpellés et/ou agressés par la police à Kinshasa et à Mbuji-Mayi – deux fiefs de Tshisekedi. Une télévision proche du candidat présidentiel Vital Kamerhe a été fermée par la cour d’appel de Kinshasa et la manifestation de protestation de ses travailleurs dispersée par la violence. Une télévision proche de Tshisekedi a été incendiée à Kinshasa dès septembre. De nombreux militants pro-UDPS (le parti de Tshisekedi) ont été arrêtés après des manifestations violentes et demeurent détenus mais rien de comparable n’a été infligé côté PPRD (le parti de Kabila) ou UNAFEC (pro-Kabila, au Katanga) malgré l’usage, là aussi, de la violence.
 
Le président de la CENI a appelé à l’enlèvement de la propagande électorale déployée sur des bâtiments publics. Cette pratique, interdite, concerne essentiellement Joseph Kabila. Rien, toutefois, n’a été enlevé jusqu’au week-end des 12-13 novembre, soit à mi-campagne, quand les portraits du chef de l’Etat ont été retirés du stade des Martyrs à Kinshasa – mais pas des autres bâtiments publics.
Les listes d’électeurs n’ont pas été affichées sur les 63 850 bureaux de vote du pays un mois avant les scrutins comme l’y oblige la loi électorale (Article 8), ce qui rend d’ores et déjà les résultats du scrutin attaquables en justice. La CENI a renvoyé les électeurs à son site Internet, mais combien de Congolais y ont-ils accès ?
De plus, souligne Jérôme Bonso, président de la Linelit (Ligue nationale pour des élections libres et transparentes), « on a dénoncé des bureaux de vote fictifs dans toutes les provinces ». La CENI n’admet que » des erreurs « . On soupçonne que si le chef de l’Etat obtient de bons résultats dans une zone, on rajoutera des bureaux de vote fictifs près de là, ayant le même genre de résultats, afin d’augmenter le nombre total de votes en faveur du candidat n°3 – le Président sortant. « On a annoncé 32 bureaux de vote au Collège Saint-Robert, à Barumbu », quartier de Kinshasa, précise de son côté Fidèle Babala, député MLC (formation de Jean-Pierre Bemba), seul grand parti d’opposition qui ait une expérience électorale. « Nous sommes allés voir : il n’y a que douze bureaux. »
Et d’ajouter : » Les mesures de contrôle – observateurs, témoins des partis -, c’est possible dans les villes. Mais la brousse est généralement une zone de non-droit, où règnent en maîtres les administrateurs de territoire, nommés par Kabila. »
Face au rouleau compresseur kabiliste, l’opposant Etienne Tshisekedi s’est lui aussi mis en dehors de la loi en s’autoproclamant, le 6 novembre, depuis l’Afrique du Sud, » président de la République » et en appelant le public « à casser les portes des prisons » pour en libérer ses militants détenus si ceux-ci n’étaient pas élargis « dans les 48 heures ». M. Tshisekedi a refusé d’y voir un appel à la violence, affirmant qu’il s’agissait d’ « une manière d’éduquer le peuple congolais » pour le pousser « à abandonner la peur » sur laquelle « est basée toute dictature ». Il a repris ce discours à Kisangani le 11 novembre, appelant ses auditeurs « à terroriser » les policiers, militaires et membres du PPRD (parti présidentiel) en cas « de tracasserie inutile » de la part de ces derniers.
 
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