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21 avril 2015

Prof André Mbata parle du « Grand Soir » du régime et du « Triangle du glissement » Ministère de l’Intérieur-CENI-Cour constitut

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André Mbata Mangu (AMB) est Professeur des Universités et sans aucun doute l’un de plus brillants universitaires congolais et dans tous les cas le constitutionnaliste congolais le plus respecté au pays et à l’étranger. Il est l’auteur de deux ouvrages sur Barack Obama, d’un récent ouvrage sur Nelson Mandela, d’un autre ouvrage sur l’abolition de la peine de mort et le constitutionnalisme en Afrique ainsi qu’une centaine d’articles dans des revues scientifiques de renom. Dans une interview exclusive accordée à Congo News (C-N), Le Prof des Universités fait l’eschatologie du régime et parle du « Grand Soir » de la monarchie présidentielle, du respect de la constitution, du procès Kamerhe, de la Cour suprême de justice, de la Cour constitutionnelle, de la CENI, des réponses d’ Evariste Boshab à la question orale avec débat de Christophe Lutundula à l’Assemblée nationale, des manifestations de xénophobie en Afrique du Sud, et aussi de lui-même.

C-News: Prof, comment allez-vous ? On vous croyait condamné à l’exil après votre agression en Afrique du Sud !
AMB : Je vais bien et me voici de retour au pays. C’était ne pas me connaître que de me croire condamné à l’exil pour avoir fustigé la monarchisation du pouvoir présidentiel en Afrique et m’être inscrit en faux contre la révision de l’article 220 de la Constitution congolaise. Ce pays nous appartient à nous tous et nul ne peut être condamné à l’exil par une coterie au pouvoir qui aurait tort de croire en être le propriétaire.

C-News: Que s’est-il bien passé en janvier dernier en Afrique du Sud ?
AMB:
Je remercie d’abord les medias indépendants dont Radio Okapi, Congo News et Le Phare qui avaient aussitôt alerté l’opinion sur l’agression dont j’avais été l’objet. J’avais reçu des messages de sympathie et d’encouragement de plusieurs personnalités scientifiques africaines, congolaises, européennes et américaines ainsi que ceux des responsables politiques de l’opposition et même de la majorité au pouvoir à Kinshasa. Je n’avais jamais cru que j’étais tant suivi et que le combat que je menais pour le respect de la Constitution et l’Etat de droit démocratique au Congo était en réalité le combat de tout un peuple. Ce qui s’était passé en Afrique du Sud était un attentat contre ma personne. La première réaction des auteurs de cet attentat qui étaient armés de revolvers était de tirer sur moi et non d’exiger un quelconque bien. Ce qui a fait penser à un commando envoyé mais qui était condamné de fuir suite à l’intervention de la garde. L’enquête reste ouverte contre des inconnus qui semblent avoir été en mission commandée.

C-News: Vous aviez eu peur?
AMB : Bien sûr, mais c’est depuis longtemps que j’ai dominé la peur. En m’opposant aux Léviathans, à leurs sbires, aux thuriféraires et aux tambourinaires du pouvoir en Afrique et en enseignant un droit constitutionnel autre que celui de l’ inanition de la nation dans un monde dominé par la prostitution politique et intellectuelle, je ne me suis jamais douté que j’étais le constitutionnaliste le moins aimé des régimes autoritaires.

C-News: Vous sentez-vous à l’aise au pays ?
AMB : On n’est jamais mieux que chez soi. Et puis, si ailleurs l’assassin peut être cagoulé, ici au moins, tout le monde sait facilement d’où le coup viendrait. Et puis, j’étais content de retrouver mes étudiants de la Faculté de Droit de l’Université de Kinshasa (UNIKIN).

C-News: Comment se sont déroulées ces retrouvailles ?
AMB : L’accueil ne pouvait qu’être délirant. Mes étudiants avaient été les premiers à m’inonder de messages de sympathie. L’UNIKIN est en effet l’unique université du pays à bénéficier de mes services, ayant moi-même été formé dans cette université. C’est ici que je remplis mon devoir patriotique de contribuer à la formation des dirigeants congolais de demain qui seront plus respectueux de la Constitution de leur pays et des droits de leur peuple. D’ailleurs, je viens de terminer avec eux mon cours de droit constitutionnel.

C-News: Que leur avez-vous dit ?
AMB : Bien de choses et surtout le respect de la Constitution, des droits humains et des leurs propres devoirs comme citoyens de la République. Je termine ce cours avec la conviction que tous les aspirants à la monarchie présidentielle trouveront devant eux une génération nouvelle appelée à leur barrer la route et qui ne tolérera plus d’hérésies en matière constitutionnelle comme celles qui leur avaient été servies, une génération qui ne saura plus se nourrir des dogmes ni de slogans mais deviendra le premier rempart de la Constitution et de l’Etat de droit démocratique.

C-News: Prof, pourriez-vous revenir sur certaines idée-force et certains concepts qui vous sont attribués tels que la « monarchie présidentielle » et les «tambourinaires du pouvoir »?
AMB : Pas trop de choses à la fois. J’avais utilisé pour la première fois l’expression de « la vie après la présidence » en 2007 lorsque je présentais une communication inaugurale lors du Forum africain sur la gouvernance qui se tenait à Ouagadougou au Burkina Faso au cours d’une séance présidée par Blaise Compaoré en présence de l’ancien président mozambicain Joaquim Chissano et du président rwandais Paul Kagamé. Je la concluais en invitant les Chefs d’Etat africains, y compris Blaise Compaoré, l’hôte du Forum, à ne pas chercher à se cramponner au pouvoir et à quitter le pouvoir avant que le pouvoir ne les quitte.

C-News: Quelle était alors la réaction de Compaoré ?
AMB : Sa réaction était celle propre à tous les autocrates. Il était si sûr de lui-même. Il doit à présent se mordre les dents dans son lieu d’exil où il est allé seul alors que tous ceux qui ne juraient que par son nom ont disparu dans la nature.

C-News: C’est le même conseil que vous aviez donné à Joseph Kabila dans une lettre ouverte datant de septembre 2013 et à laquelle il n’a jamais répondu ?
AMB : Comme citoyen de la République, je lui conseillais de tirer les leçons de l’histoire récente de notre pays et de l’Afrique avec les dirigeants comme Mobutu et Compaoré et de se retirer du pouvoir en 2016 après avoir fait ses adieux au peuple congolais qui l’aura accepté à la tête de l’Etat pendant 15 ans. Le peuple congolais et d’autres peuples d’Afrique ne toléreront plus. Il y a une vie après la présidence.

C-News: Et la monarchisation du pouvoir présidentiel ?
AMB : Des hommes généralement jeunes qui arrivent au pouvoir à la suite du décès de leurs pères en violation des dispositions constitutionnelles en la matière comme on l’a vu au Togo, au Gabon, et en RDC ; des fils préparés pour succéder à leurs pères comme c’était le cas au Sénégal, en Egypte, en Lybie et actuellement en Uganda, au Congo-Brazzaville ou en Guinée équatoriale ; des sœurs, frères, cousins, cousines, oncles, tantes, femmes et mères des présidents qui se comportent comme des membres d’une dynastie royale et qui ont préséance sur les membres du gouvernement ; des Présidents qui croient s’éterniser au pouvoir par des violations constitutionnelles et des fraudes électorales avec l’ aide d’une armée de courtisans ; c’est à tout cela que renvoie le concept de « monarchie présidentielle ».

C-News: Et qui appelez-vous les « tambourinaires du pouvoir » ?
AMB : Il s’agit en réalité des thuriféraires et des flatteurs du pouvoir, des politiciens du ventre, des journalistes du ventre, des intellectuels du ventre, des professeurs du ventre, des pasteurs et évêques du ventre et de tous ces hommes et femmes sans scrupule qui ont vendu leur âme au diable et sacrifié des valeurs sur l’autel de leurs intérêts matériels en se mettant au service des monstres qui gouvernent.

C-News: Que pensez-vous de la justice dans notre pays ?
AMB : Le Congo n’est pas seulement malade de sa classe politique et intellectuelle, mais aussi de ses cours et tribunaux. Contrairement au prescrit de la Constitution, il n’y a pas de justice indépendante. Elle interpelle, juge et condamne ceux que le pouvoir en place voudrait interpeller, juger et condamner.

C-News: Un commentaire sur la Cour suprême de justice?
AMB : Jamais dans l’histoire du Congo on n’a connu une Cour aussi asservie au pouvoir et aussi incompétente que la Cour suprême de Justice condamnée constitutionnellement à disparaître. On peut se souvenir de ses arrêts iniques dans les contentieux électoraux de 2006 et 2011 lorsque cette Cour avait validé des résultats frauduleux, allant même jusqu’à insinuer en 2011 que le droit n’interdisait pas à un candidat à une élection présidentielle d’obtenir plus de 100% de voix dans une circonscription ! En 2011, les magistrats de la Cour suprême avaient été internés dans un hôtel de Kinshasa pour décider du contentieux électoral.

C-News: Et l’Affaire Kamerhe ?
AMB : Ce procès de la honte de la justice aura révélé au monde entier son instrumentalisation par le pouvoir en place et aussi l’incompétence des magistrats de la Cour suprême de Justice du Congo. Tout le monde dans la MP comme dans l’opposition sait que les élections de 2011 avaient été un cocktail de fraudes et avaient été dénoncées par tous. Dans cette affaire instruite par le parquet général sur injonction de l’ancienne Ministre de la Justice, le Procureur général et l’ensemble des juges de la Cour se sont accordé le pouvoir de juger Mr Kamerhe. Pourtant, même un étudiant de la première année de la Faculté de Droit sait que Mr Kamerhe n’est plus justiciable de la Cour suprême depuis son départ de l’Assemblée nationale. Tenez, uriner en public est une infraction d’attentat aux bonnes mœurs. Est-ce pour autant que le Parquet va poursuivre ? Imaginez combien de gens seraient alors poursuivis dans la Ville de Kinshasa ou ailleurs ! Aussi, il n’y avait aucune opportunité de poursuite contre Mr Kamerhe qui condamnait les fraudes non pas à titre personnel, mais comme le responsable d’un parti politique qui est une personne morale.
Le Parquet agit sur injonction du Ministre de la Justice, membre du gouvernement de la MP. C’est tout simplement un procès politique pour nuire à celui qui est devenu l’un des plus farouches opposants du régime. Sur un autre chapitre, considérant une décision récente de la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples, je pense que notre droit qui reste d’inspiration coloniale est dépassé. Un gouvernement et un parlement responsables dans notre pays devront le moment venu dépénaliser l’infraction d’imputations dommageables à l’ endroit de la presse, des acteurs politiques ou des personnes publiques.

C-News: Que pensez-vous de la Cour constitutionnelle ?
AMB : Elle sera présidée par un magistrat qui avait joué un rôle important dans le contentieux électoral de 2006 quand il était juge à la Cour suprême et dont certains ont considéré la nomination comme une récompense méritée pour des services rendus. En regardant au passé de ses membres qui sont tous des sociétaires de la Majorité présidentielle ou apparentés, il y a de fortes inquiétudes au sujet de l’indépendance de la Cour et de sa capacité de contribuer à la promotion de l’Etat de droit dans notre pays. D’autre part, le contentieux constitutionnel est un contentieux très technique et rigoureux qui n’a rien à avoir le contentieux des divorces, des conflits parcellaires, d’abus de confiance, de diffamation et de vol dans lesquels beaucoup de nos magistrats se sont spécialisés. Un recyclage s’impose pour les membres de la Cour constitutionnelle. Je voudrais bien leur faire confiance et les voir démentir tout le mal qui se dit à leur sujet en exerçant le « devoir d’ingratitude » envers ceux qui les ont nommés et dont le mandat s’arrête heureusement en 2016. L’affaire Kamerhe sera un important test. Plus important encore sera la requête pour la déclaration de l’inconstitutionnalité de la peine de mort que je viens de déposer devant cette Cour.

C-News: Que pensez-vous de l’indépendance de la CENI?
AMB : Elle est constitutionnelle. Cependant, les membres de la CENI et ceux du gouvernement en parlent tellement que de nombreuses personnes ont fini par croire qu’ils le font parce qu’elle n’est pas en réalité indépendante. La CENI qui n’est même pas une institution constitutionnelle de la République, mais un simple organe de l’Etat ne saurait être plus indépendant que l’Etat congolais qui fonctionne actuellement comme un Etat failli sous tutelle de la Communauté internationale, un Etat nourri aux mamelles de cette Communauté, incapable de sécuriser son propre territoire sans elle, incapable de financer une enquête internationale sur ses nombreuses fosses communes, de se construire un « Palais de Justice », ou de financer ses propres élections. L’Etat congolais est même incapable de décider du départ des troupes étrangères de son territoire comme on l’a vu lors du débat sur la prolongation du mandat de la MONUSCO.

Les visites régulières des représentants de la Banque mondiale et du FMI à Kinshasa apparaissent comme des visites d’inspection des organisations qui exercent la tutelle sur la fameuse « Troïka économique » du gouvernement et la Banque centrale et qui en cas de besoin n’hésitent pas de convoquer les responsables congolais à Washington. On ne peut pas parler d’indépendance dans la dépendance ni de liberté et de souveraineté dans la servitude. La CENI ne saurait donc être plus indépendante que l’Etat congolais qui ne l’est pas. ’

C-News: Pour vous la CENI n’est donc pas indépendante ?
AMB : Sur papier oui, mais en réalité, elle n’a jamais été indépendante. Elle ne l’était déjà pas sous la direction du Pasteur Malu Malu ni celle de l’Abbé Malu Malu. Rien n’a changé pour qu’elle soit plus indépendante avec le retour à sa tête de cet arrogant prélat catholique qui n’a cessé d’importuner la Nation tout entière après avoir nargue la CENCO et le Vatican et qui trouverait mieux sa place dans les rangs des communicateurs de la Majorité présidentielle (MP) plutôt que dans un presbytère ou dans une paroisse. Dans les faits, la CENI est sous la tutelle de la MP qui a nommé ses membres et envers qui elle tient à rester loyale. Cette tutelle est exercée par l’Assemblée nationale dirigée par le Secrétaire général de la MP et le gouvernement de la Majorité, plus spécialement le Vice-premier ministre et ministre de l’intérieur qui depuis longtemps partage la même loge que le président de la CENI. On comprend que les communicateurs de la Majorité et le porte-parole du gouvernement soient devenus aussi des porte-paroles de la CENI et que toute critique contre la CENI soit ressentie comme une attaque contre la Majorité. Comme l’a démontré la question orale de l’Honorable Lutundula, le discours sur l’indépendance de la CENI et sa capacité d’organiser des élections crédibles n’impressionne plus personne même dans les rangs des dindons (de la farce), des pigeons (faucons et colombes) et d’autres oiseaux de la basse-cour de la ferme la plus célèbre du Congo.

C-News: Vous parliez d’une «loge» à laquelle appartiendraient le Vice-premier ministre Évariste Boshab et l’Abbé Malu Malu, le président de la CENI ?
AMB: Pas de « prima curia » comme du temps de Maréchal Mobutu. Cependant, lorsque le livre du Prof Boshab présenté à l’Hôtel du Fleuve était encore en discussion, j’avais affirmé que ce livre avait été soutenu par la Cellule d’appui à la politologie pour l’Afrique, le Pacifique et les Caraïbes (CAPAC) dirigée par le belgo-congolais Bob Kabamba. Le Prof Boshab et l’Abbé Malu Malu étaient parmi les éminents membres de cette cellule. Le premier devait utiliser son savoir scientifique pour convaincre la Nation d’accepter la révision de l’article 220 de la Constitution pour donner un troisième mandat au président en exercice pour ne pas être condamnée à mort ou à l’«inanition ». Quant à l’Abbé Malu Malu, il avait mission de recourir à son incontestable expertise en matière de fraudes électorales par la manipulation du fichier électoral pour organiser un référendum et en proclamer les résultats en faveur du régime. A périodes exceptionnelles, hommes exceptionnels. Il existe depuis longtemps une complicité indéniable entre les deux hommes et ce n’est pas un pur hasard si l’un dirige aujourd’hui le puissant ministère de l’intérieur et que le prélat catholique qui avait déjà fait un excellent travail en 2006 a été rappelé et maintenu à la tête de la CENI malgré toutes les protestations de la CENCO. La mission est simple : multiplier les stratégies (mise en place de nouvelles provinces, retard dans le dépôt du projet de loi sur la répartition des sièges…) pour qu’en 2016 la CENI soit en mesure de demander et d’obtenir de la Cour constitutionnelle le report des élections présidentielles et législatives avant d’exercer le « ministère de la fraude » lorsque ces élections auront finalement lieu. Le gouvernement à travers le ministère de l’intérieur, la CENI et la Cour constitutionnelle nouvellement installée constituent le nouveau triangle du glissement du cycle électoral en RDC.

C-News: Et le calendrier de la CENI?
AMB : Sous pression de l’Opposition et de la Communauté internationale, cette CENI prétendument indépendante a fini par lâcher après s’être entêtée pendant plusieurs mois. Son calendrier est global certes, mais les propos entendus dans les rangs de la Majorité et de l’Opposition lui dénient un caractère consensuel. Le calendrier est aussi irréaliste. Le gouvernement qui vient de décider de la mise en place tardive des provinces n’a pas les moyens de sa politique qui est en réalité celle de la Majorité. Lors du débat de samedi dernier à l’Assemblée nationale, l’Honorable Bamporiki a démontré sans être contredit par le Ministre de l’Intérieur que depuis 2013, le gouvernement qui viole la Constitution en ne rétrocédant pas les 40% des ressources nationales aux provinces n’a même pas débloqué 15% du budget voté pour les élections et qu’il ne pourra pas faire en trois mois ce qu’il n’a pas pu faire en trois ans.

Il n’y a pas de réelle volonté politique de terminer les élections en 2016. Après avoir échoué à faire réviser la Constitution et à obtenir le report des élections en le subordonnant au recensement de la population qui pouvait prendre 4 à 8 ans, le gouvernement reste dans la même logique en préparant le terrain pour le report des élections en violation de la Constitution. L’ONIP dont on disait qu’il pouvait organiser le recensement dans moins d’un an n’même pas encore de bureau ni de personnel, preuve que ce n’était qu’un bluff. Il n’y a pas d’argent pour organiser les élections locales dans 67000 bureaux de vote repartis. Ces élections bien qu’importantes qui n’ont pas été organisées depuis 8 ans peuvent attendre 2017.

C-News: Ces différentes stratégies de report des élections peuvent-elles réussir ? Et pour vous, est-ce le temps de la fin du régime de la Majorité présidentielle ?
AMB : Je ne pense pas que notre peuple se laissera faire, lui qui avait envoyé au mois de janvier un message clair à la Majorité qui venait nuitamment de cracher sur la tombe de Patrice Lumumba, notre Héros national, en votant une loi électorale en violation de la Constitution. Ce message avait été capté 100% par son Autorité morale. Il n’y a pas lieu de faire marche arrière pour ne pas subir le sort de la femme de Lot dans la Bible. Le Marechal Mobutu qui avait succombé aux conseils des tambourinaires de son pouvoir en revenant sur ses promesses démocratisation d’avril 1990 en sait quelque chose. Le mouvement est irréversible. L’histoire a toujours fini par écraser ceux qui ont osé aller dans le sens contraire. Pour la MP comme pour le président, il y a un temps pour gouverner et un temps pour partir, un temps pour travailler et un temps pour se reposer si on a bien travaillé pour son peuple. Mon conseil : il ne faut rien forcer au risque de tout casser. Il y a une vie après la présidence et après le pouvoir. Notre peuple a besoin de a MP dans l’Opposition.

C-News: Vous parlez du « glas »qui aurait sonné pour emprunter le titre du livre écrit naguère par Honoré Nganda ? Est-ce bien l’eschatologie ou le « Grand Soir » du régime ?
AMB : Un peu de tout cela. Mr Ngbanda qui avait été l’un des piliers de la dictature du Maréchal Mobutu était parmi les premiers à tirer sur le monstre qu’ils avaient servi avec loyauté et qu’ils adoraient. Le MPR n’avait pas survécu et la MP telle qu’on la connait actuellement ne survivra pas. C’est bien le « Grand Soir » du régime, l’eschatologie. Le « coq » s’apprête à chanter pour amener au-devant de la scène des personnages comme Pierre qui répéta plus d’une fois qu’il ne connaissait pas Le Seigneur Jésus-Christ alors qu’il mangeait et buvait avec lui. C’est le début du temps de la fin et celui des reniements déjà vécu par les anciens dignitaires du régime Mobutu aujourd’hui dans le gouvernement de la majorité. Moins d’une année après la chute de leur « dieu », « Mulopo » ou « Mulopwe » Mobutu, Sakombi Inongo –paix à son âme – le bouillant ministre de l’information – en réalité de la désinformation – qui a son sosie bien connu dans le régime actuel se convertissait en devenant « Frère Dominique » pour témoigner partout que Mobutu n’était qu’un démon qui buvait du sang humain. J’espère vivement qu’après 2016, la MP actuelle ne fera pas la même chose que le MPR en donnant naissance à un nouveau converti (Frère, Pasteur, Prophète…) qui puisse raconter des bêtises en prétendant que quelqu’un dans son sein buvait du sang… des fosses ou des tombes communes ! Au Congo, l’histoire semble malheureusement se répéter avec des personnages qui se ressemblent étrangement au point de vous donner des sueurs froides et des crises cardiaques.

C-News: Un mot sur les fosses ou tombes communes ?
AMB : La Bible dit que rien de ce qui se fait de nuit ne restera caché. C’est incroyable que les gouvernants qui se réclament du peuple puissent réserver un tel traitement inhumain à leurs compatriotes morts indigents après qu’ils les aient eux-mêmes condamnés à cette indigence. Une enquête indépendante et internationale est nécessaire pour faire la lumière sur cette affaire. La refuser serait une preuve que le gouvernement a des choses à cacher, contrairement aux nombreux démentis de ses porte-paroles. En outre, les indigents ne sont pas des inconnus. S’ils n’ont pas été ramassés dans la rue mais des parents les ont amenés à l’Hôpital avant de les abandonner faute de moyens, ils étaient au moins enregistrés. Les fiches et certificats de décès sont également nécessaires pour nous convaincre qu’il s’agissait des indigents. En outre, on devrait permettre l’exhumation des corps. Le ministre de la justice ne doit pas tromper le peuple en prétendant que celle-ci dépend des autorités judiciaires lorsqu’il sait que le parquet qui instruit le dossier n’est pas indépendant et travaille sous ses instructions. Enfin, avons-nous des dirigeants humains ? Qu’avons-nous fait des valeurs africaines qui nous imposent le respect à la fois pour les vivants et pour les morts qui deviennent nos ancêtres ?

Comment un gouvernement qui prétend avoir des millions de dollars pour recenser la population, mettre en place de nouvelles provinces et organiser des élections dans 67 000 bureaux de vote pouvait-il manquer moins d’un million de dollars pour payer des cercueils et enterrer dignement moins de 500 personnes au lieu de les jeter comme des chiens dans un trou ? L’exhumation aura lieu tôt ou tard. Les victimes seront bien identifiées et les personnes responsables subiront toute la rigueur de la loi en droit pénal national ou international pour crime contre l’humanité qui est un crime imprescriptible et que le temps ne peut donc pas effacer.

C-News: Avez-vous à dire sur l’arrestation et puis la libération des militants pro-démocratie du « Balai citoyen » et de « Y’ en a marre » et sur leur collègues du mouvement Filimbi en prison?
AMB : Très mauvaise et honteuse publicité internationale pour le pays. Preuve, s’il en était encore, que nous sommes encore loin de l’Etat de droit démocratique où les droits et libertés sont garantis. Toutes ces personnes devraient être libérées sans délai. Les qualifier de terroristes serait simplement faire preuve de cécité et de surdité intellectuelles et politiques. Comme dans l’Apocalypse, une forte trompette a sonné pour annoncer la fin des régimes autoritaires et corrompus et le début d’une ère nouvelle en Afrique. Il serait mieux de l’entendre pour échapper au « jugement dernier » et ne pas rater l’Enlèvement et la rencontre avec Le Seigneur.

C-News: Un mot la question orale avec débat de l’Honorable Christophe Lutundula à l’Assemblée nationale ?
AMB : Félicitations à Christophe Lutundula, un juriste brillant et intègre qui n’avait pas toujours su défendre ses idées au sein de la Majorité, mais mieux vaut tard que jamais. On l’a qualifié de « traitre » et d’«ingrat ». J’ai entendu des gens qui ne lui arrivent même pas à la cheville contester ses connaissances comme juriste et le traiter de tous les noms parce qu’il a su s’élever au-dessus de la basse-cour et du raisonnement de ses applaudisseurs automatiques. J’ai surtout apprécié sa conclusion : « si nous ne réglons pas les problèmes, les problèmes finirons par nous régler les comptes tôt ou tard ».

C-News: Et les réponses du Vice-premier ministre Evariste Boshab ?
AMB : Je le connais depuis plus de trois décennies depuis qu’il était notre ainé à la Faculté de Droit de l’UNIKIN et le Maire du Home 30 sur le Campus. Evariste est resté égal à lui-même et ses réponses ne pouvaient convaincre que la basse-cour. Cependant, on doit lui reconnaître le mérite d’avoir su mettre son génie au service du régime et le poste de Premier ministre aurait été une juste récompense du régime qu’il sert avec loyauté depuis des années, multipliant des stratégies pour lui permettre de conserver le pouvoir même jusqu’à ce que Le Seigneur Jésus-Christ revienne. En 2011, il était l’un des architectes de la révision constitutionnelle ayant supprimé le second tour de l’élection présidentielle. Lors des élections, pour assurer la majorité à son parti, le PPRD, avec le concours du Prof Lumanu, le Ministre PPRD de l’Intérieur, il avait eu l’intelligence de créer une constellation d’environ 300 partis politiques qui avaient présenté des candidats avant de disparaître. Son livre « Entre la révision de la constitution et l’inanition de la nation » n’avait comme objectif que de contribuer à la pérennisation du pouvoir par son parti. Devenu ministre de l’intérieur, il a joué un grand rôle dans la mise en place de l’ONIP œuvrant sous la tutelle de son ministère et dirigé par le Prof Lumanu. L’inclusion du recensement comme préalable aux élections dans le projet de loi électorale présenté à l’Assemblée nationale au mois de janvier dernier était également l’œuvre de son génie. Le connaissant bien depuis des années, j’ai toujours bien compris le Prof même lorsqu’il parle à demi-mots ou lorsqu’il se tait tout simplement. Sa réponse à la question de l’Honorable Lutundula était claire et limpide et c’est la réponse de la MP et de son gouvernement qui reste dans la logique de la conservation du pouvoir et du report des élections présidentielles en mettant précipitamment en place de nouvelles provinces et en exigeant l’organisation des élections municipales et locales tout en sachant bien que les finances nationales ne permettront pas l’organisation de l’élection présidentielle. L’Abbé Malu Malu avait déjà dit qu’il s’adresserait à la Cour constitutionnelle si la CENI était incapable d’organiser les élections dans les délais. Et si, en se fondant sur l’insuffisance de moyens financiers que le gouvernement ne lui donnera pas, la CENI utilisait cet argument comme un cas de « force majeure » devant la Cour constitutionnelle, celle-ci n’aurait aucun pouvoir pour la contraindre d’organiser l’élection présidentielle. Les membres de la Cour n’auraient même aucun intérêt à le faire eux qui ont une lourde dette morale à payer à la MP. Toutefois, les choses ne sont pas si simples.

Il faudra éviter que le peuple souverain qui s’est déjà exprimé en janvier et qui reste en éveil ne se remette en action. Nul n’est plus grand que le peuple et nous ne devrions pas nous entêter en faisant prévaloir nos intérêts partisans et égoïstes sur ceux de notre peuple. Il n’y aurait aucun problème si le gouvernement pouvait organiser toutes les élections, des locales à la présidentielle en 2016. Cependant, comme il ne le peut pas faute de moyens, préparons uniquement des élections parlementaires et présidentielles crédibles en 2016 et les autres peuvent être organisées après.

C-News: Qu’avez-vous à dire sur les attaques xénophobes en Afrique du Sud ?
AMB : Une honte pour l’Afrique du Sud, pour l’ANC et pour le gouvernement du Président Jacob Zuma qui avait allumé le feu en adoptant des lois sévères sur l’immigration et l’attribution des visas après avoir bénéficié du soutien d’autres peuples africains dans la lutte contre l’ Apartheid. Mandela devait se retourner dans sa tombe et les Sud-africains devraient avoir honte et se sentir ridicules partout où ils se trouvent. Ils n’attaquent pas les Blancs qui les ont chosifiés durant l’apartheid, mais leurs propres frères et sœurs africains qui les avaient aidés à combattre ce système odieux. Le fils de Zuma fait partie des instigateurs de ces attaques. Un gouvernement congolais responsable aurait réagi comme l’a fait le Nigeria en envoyant un message clair au gouvernement sud-africain. Président ou Premier Ministre congolais, je n’aurais pas hésité d’interdire les vols SAA pendant tout le temps que les sud-africains continueraient avec leurs attaques contre d’autres africains. J’aurais rappelé en consultation notre Ambassadeur à Pretoria tout en convoquant celui d’Afrique du Sud à Kinshasa et les sociétés sud-africaines comme VODACOM recevraient un message de mon gouvernement à l’intention du peuple sud-africain.

C-News: Prof, quel est finalement votre avenir politique, un universitaire ou un politicien ?
AMB : Un universitaire et un homme politique ou un homme d’Etat plutôt qu’un politicien dans le sens péjoratif que ce mot revêt au Congo. Je reste un universitaire résolument engagé à la cause de son peuple, partageant non seulement ses souffrances, ses peines et ses inquiétudes, mais aussi ses espoirs et ses rêves pour le changement et le mieux-être. Chaque chose a son temps. Je suis content dans ma peau de professeur des universités. Je continue à enseigner les valeurs et les principes de l’Etat de droit démocratique aux hommes et femmes au pouvoir ou dans l’opposition, aux gouvernants comme aux gouvernés. Je verrai le moment venu quel autre rôle je pourrais jouer pour continuer à servir notre peuple. En attendant, je ne peux me réjouir avec lui de la victoire historique que nous avons remportée contre les démons de la dictature, de l’autoritarisme et de la monarchisation du pouvoir en barrant la route aux partisans de la révision ou du changement de la constitution. Cependant, a luta continua. Notre lutte pacifique pour l’avènement et la consolidation d’un Etat de droit démocratique tel que recherché par notre peuple doit se poursuivre car notre victoire n’est pas encore complète. Nous n’avons fait qu’un bout du chemin.

MTN

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Commentaires
T
Ainsi parla le PROF. Et tous les etudiants dirent, Alleluiaaaah et AMINAAAH
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