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Kasai Direct
1 septembre 2014

L’avenir de Kabila divise… la majorité présidentielle

Le Soir

Voici quelques semaines, inaugurant le complexe agro industriel de Bukanga Lonzo, le président Kabila nous déclarait «le meilleur discours, c’est le silence ».

Il illustrait ainsi sa volonté de ne pas dévoiler ses intentions sur le sujet de l’heure : sera-t-il ou non candidat à sa propre succession lors de l’élection présidentielle de 2016 ?
Lors d’une réunion des partis membres de la majorité présidentielle, qui s’est tenue voici quelques jours dans la ferme que Kabila possède à Kingakati, proche de Kinshasa, le flou a été dissipé. Selon un compte rendu écrit de la rencontre, dont nous avons pu avoir connaissance, plusieurs points se dégagent : il est acquis qu’un nouveau gouvernement sera présenté lors de la prochaine rentrée parlementaire le 15 septembre prochain mais surtout, il apparaît que le projet du PPRD, le parti majoritaire au Parlement, de modifier la Constitution afin de prolonger ou de renouveler le mandat du président sortant, se heurte à de solides résistances émanant des formations alliées du pouvoir.
Aubin Minaku, président de l’Assemblée nationale et secrétaire général de la majorité présidentielle, a été clair dans les « éléments de langage » donnés aux troupes : « la majorité présidentielle dispose du meilleur projet de société et doit rester au pouvoir », « les dispositions de la constitution actuelle doivent être améliorées et pour tout changement, il faudra s’en référer au « souverain primaire » c’est-à-dire organiser un referendum constitutionnel. »
Soutenant cette ligne, le ministre des Communications Kin Kiey Mulumba, qui fut déjà aux affaires du temps de Mobutu et du RCD Goma, a rappelé, fort de son expérience personnelle qu’ « en politique, rien ne résiste, que tout est politique… »
Quant au président Kabila, haranguant ses troupes, il les a d’abord incitées à engranger des résultats : « on a encore trois ans, il faut travailler jour et nuit, éviter les distractions. Au lieu de parler des kilomètres de routes à construire, on préfère trop souvent faire des discours kilométriques… » Mais le « chef de chantier de la nation » a aussi relevé sa visière : « la question de rester au pouvoir ne se pose pas. C’est devenu une question de survie. On a encore besoin de stabilité dans ce pays. » Autrement dit, l’équipe actuelle et son chef de file comptent bien se donner les moyens de « rempiler » après 2016, en modifiant la Constitution et en appelant au verdict populaire sur ce sujet, ce qui pourrait conduire à une 4e république si la Constitution actuelle, rédigée puis ratifiée après les accords de paix de Sun City était jugée obsolète, enter autres parce que l’article 220 verrouille le mandat présidentiel limité à deux termes.
Cette option est loin de faire l’unanimité : sans surprise, l’opposition s’y oppose et compte organiser des manifestations populaires, mais surtout la majorité présidentielle est elle-même partagée. A Kingakati, de sérieux bémols se sont fait entendre, « seul le peuple peut déverrouiller la Constitution, il faut mener des enquêtes pour jauger l’état de l’opinion » a suggéré M. Bahati Luebo, Ministre du Travail tandis que le Katangais Banza Mukalay, Ministre des Sports mettait en garde : « il faut éviter une politique d’affrontement avec les puissances » faisant ainsi allusion aux déclarations musclées de l’émissaire américain Russ Feingold, qui avait désapprouvé toute modification de la Constitution et que le président Kabila dans son discours avait négligemment qualifié de « fonctionnaire de passage ici »….
Les critiques les plus lourdes sont venues du MSR, le Mouvement social pour le renouveau, un parti longtemps considéré comme plus proche encore de Kabila que le PPRD lui-même : il a été fondé avant les élections de 2006 par feu Samba Kaputo, l’ancien conseiller spécial du président et est aujourd’hui encore dirigé par Pierre Lumbi, qui conseille Kabila en matière de sécurité et fut le principal négociateur des contrats chinois. Mais surtout le MSR puise ses élus et ses cadres dans les forces vives de la nation : les membres de la société civile qui, au début des années 90 animèrent la conférence nationale souveraine, les nombreux militants de l’ombre qui, après la chute de Mobutu, refusèrent l’occupation étrangère et animèrent la résistance des provinces de l’Est. Ces hommes là ont souvent représenté les « bataillons secrets » de Kabila lui-même, en première ligne dans la lutte pour la souveraineté, le développement et la démocratisation du pays.
A Kingakati, ce sont des faits précis que le président du groupe parlementaire du MSR M. Bolengetenge a alignés : « le parti », a-t-il expliqué, « a consulté ses 26 fédérations à travers le pays dont 22 avaient organisé des conventions. Il est apparu que trois des fédérations approuvent l’idée d’un changement de la Constitution, que quatre d’entre elles considèrent que « la situation est difficile et que le pays risque de glisser vers les dispositions intangibles» tandis que 19 fédérations appellent au respect de la loi fondamentale actuelle et soulignent que le 23 octobre 2013 le président lui-même avait promis de rester fidèle à la lettre et à l’esprit de la Constitution. »
En conclusion, le député résume ainsi l’opinion de ses collègues : « on veut bien rester au pouvoir, mais il faut rester en phase avec la population et avec ceux qui sont au-delà de nos frontières. » (allusion à une diaspora largement hostile à toute réforme constitutionnelle et pour laquelle Kin Kiey Mulumba veut organiser des charters afin de mieux faire connaître la réalité du pays.)
La majorité présidentielle se trouve ainsi divisée entre deux perceptions différentes de l’opinion congolaise : les uns estiment que le bilan positif déjà engrangé (fin-relative- de la guerre à l’Est, modernisation du pays, développement des grands axes routiers, succès macro économiques etc..) ne peut que susciter la reconnaissance de la population, qui, lors du referendum constitutionnel, devrait soutenir le maintien au pouvoir d’une « équipe qui gagne ».
Les autres par contre mettent en garde contre le caractère explosif et polarisant d’une consultation qui, en définitive, se résumerait à une question essentielle : faut il modifier ou abolir la Constitution actuelle pour préserver le pouvoir d’un seul homme ? Et de rappeler que le texte actuel, certes imparfait et fruit de laborieux compromis, a eu le mérite de mettre fin à la guerre et représente toujours le socle de la paix civile…Le Congo est-il suffisamment solide et pacifié pour se permettre de déjà détruire ou de modifier les fondations actuelles ?
A Kingakati, mais aussi à tous les niveaux de l’opinion, le débat qu’il a lui-même suscité alimente désormais les « discours kilométriques » que dénonce le chef de l’Etat et il paralyse le travail sérieux…

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P
Aucun homme n'est indispensable. Seul Dieu YAWEH est ETERNEL et ABSOLU.
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