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Kasai Direct
25 juillet 2014

Plus de 2 millions de déplacés internes dans l’Est

Suite à une paix précaire dans les territoires meurtris de l’Est, l’errance est le lot quotidien des populations locales. Selon un récent rapport d’Ocha, les déplacés internes ont dépassé le seuil de deux millions.

Un scénario qui présage à une aggravation du drame humanitaire, lequel remet en mémoire les six millions de morts déjà recensés dans les confits armés dans cette partie du pays.

« Les déplacements forcés de populations, induits par les violences armées, sont la partie visible du + iceberg + qu’est la crise de protection à laquelle des centaines de milliers de civils continuent d’être confrontées dans les cinq provinces de l’Est de la République démocratique du Congo : le Katanga, le Maniema, le Nord-Kivu, la Province Orientale et le Sud-Kivu ». C’est en ces termes que le Bureau des affaires humanitaires des Nations unies (Ocha) introduit son bilan humanitaire pour le mois de juin.

Pour cet organisme spécialisé du système des Nations unies, la situation est explosive. Au regard des statistiques récoltées dans les cinq provinces les plus vulnérables de la RDC, plus de deux (2) millions de Congolais ont été obligés de fuir pour se protéger contre des exactions de tous genres.

« Fin juin 2014, note Ocha, citant les différentes Commissions mouvements de population (CMP), ils étaient encore environ de 2,5 millions de personnes contraintes de vivre loin de leur village d’origine, les uns ont fui l’insécurité dans leur communauté depuis 2009, les autres se sont déplacés plusieurs fois au cours de la même période à la recherche d’une oasis de paix ».


Si Ocha se félicite d’une légère baisse du nombre de ces déplacés par rapport à la situation à la fin du premier trimestre 2014, soit 2,6 millions, il reste cependant, mentionne-t-il, que « les mouvements de retour des personnes déplacées internes (PDI) sont encore moins importants faute de garanties de protection dans les zones d’origine de déplacés ».

Pendant que Ocha s’alarme sur la situation désastreuse des déplacés internes, à Kinshasa, c’est l’indifférence totale. Les faits ne semblent pas retenir l’attention des autorités centrales, préoccupées certainement par quelque chose qui serait plus précieux que le sort de plus de deux millions de Congolais condamnés à l’errance dans leur propre pays.

Même s’il use de circonlocutions, Ocha est d’avis que le « contrôle absolu » du territoire national dont se prévalent les autorités politiques de Kinshasa n’est qu’apparent : « Bien que certains estiment que la RDC ne compte plus actuellement de +grands+ groupes armés suffisamment structurés et médiatisés avec des agendas politiques assez clairs, le pays regorge encore de nombreux seigneurs de guerre. Certains de ces groupes armés –  impliqués dans l’exploitation illégale des ressources - commettent de nombreuses atrocités à l’encontre des populations civiles en profitant de la faiblesse de l’autorité de l’Etat dans leur zone de prédilection, particulièrement les zones rurales les plus éloignées ».

LE MAL EST PROFOND

L’accalmie observée depuis un temps dans la partie Est de la RDC n’a pas véritablement résolu le problème de l’insécurité persistante. De même, la déroute de l’ex-M23, supposée avoir scellé le retour d’une paix durable dans l’Est, n’a pas non plus sécurisé cette région meurtrie du pays.

Tout compte fait, la paix dans l’Est demeure encore fragile. Ocha en fait mention dans son rapport humanitaire de juin 2014. Malgré la relative baisse, soit 2,5 millions fin juin 2014 contre 2,6 millions trois mois plutôt, la situation humanitaire à l’Est reste explosive.

A ce jour, mentionne Ocha, aucune lueur de sortie de crise ne peut être envisagée avec sérénité. Ce qui condamne, prédit-il, pour longtemps encore les populations civiles à l’errance. Des Congolais devenus étrangers dans leur propre pays. Et dire que le chiffre de 2,5 millions de déplacés est une estimation  arrêtée peu avant juin 2014. Si l’on devait prendre encore d’autres paramètres et inclure dans les données d’Ocha la situation similaire dans les coins perdus de l’Equateur et de la Province Orientale, l’on serait donc à plus de trois millions de déplacés internes.
Voilà une situation qui aurait, en toute logique, suscité un élan de solidarité des autorités de Kinshasa. Pour l’instant, il n’en est pas encore le cas. En effet, Kinshasa considère qu’avec la fin du M23, tous les problèmes de l’Est du pays ont été résolus au même moment. Comme par un coup de baguette magique. Une grave erreur d’analyse.

Kinshasa ferait mieux de se pencher sérieusement sur ce nouveau drame humanitaire de l’Est. Les 2,5 millions de déplacés recensés par Ocha ont droit à une assistance. Les rejeter dans la nature, comme c’est le cas, c’est jeter en pâture la mémoire de six millions de morts de l’Est - une plaie qui peine à se cicatriser.

Cette interpellation va droit également vers tous les partenaires extérieurs engagés pour le retour d’une paix durable en RDC.


Encadré

Situation dans les provinces

Le Nord-Kivu reste, selon  Ocha, la province avec la plus importante population déplacée interne estimée à plus de 908 000 personnes fin juin 2014. Ce qui représente une baisse d’environ 15% par rapport au 31 mars dernier. Plus du tiers de cette population déplacée interne (35,3 %) se trouve dans le territoire de Masisi.

Malgré la diminution du nombre total de personnes déplacées dans la province du Nord-Kivu, les mouvements de populations continuent dans des poches d’insécurité où s’activent des groupes et autres bandits armés. Au cours du mois de juin 2014, environ 33 650 nouveaux déplacés ont été enregistrés suite notamment à la poursuite de la traque des miliciens ougandais de l’Allied Defense Forces (ADF) par les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) dans le territoire de Beni, à l’activiste des groupes armés et aux opérations de l’armée contre ces groupes dans les territoires de Masisi, Lubero et Walikale.

 Conséquence de cette situation : les mouvements de retour restent aléatoires. L’environnement sécuritaire étant toujours imprévisible dans certaines zones de retour, le risque de nouveau déplacements reste permanent, rendant ainsi aléatoire les mouvements de retour des déplacés.

A cela s’ajoutent l’accompagnement des mouvements de retour - surtout après un long déplacement - qui n’est pas une garantie. D’où les difficultés auxquelles font face des personnes dont  les maisons étaient incendiées lors des déplacements.

Outre les contraintes budgétaires affectant l’aide humanitaire, la faiblesse des programmes de sortie de crise dans de nombreuses zones touchées jadis par l’insécurité et la lenteur dans le rétablissement de l’autorité de l’Etat n’aident pas à créer un environnement propice pour des mouvements de retour plus soutenus, fait remarquer OCHA.

Au Katanga, rapporte le bulletin d’OCHA, les déplacements de la population continuent avec l’expansion de la zone d’insécurité. De 500 284 à la fin du mois de mars, elle est passée à 543 540 personnes fin juin 2014, soit une augmentation d’un peu plus de 43 000 personnes (8,6%).

Outre la crise créée par les miliciens armés « Bakata-Katanga » qui a conduit dernièrement aux incendies des maisons, tueries et autres exactions dans le Sud-est du territoire de Manono (Kahongo, Kishale, Mpiana et Shamwana), plus de 70% des personnes déplacées entre mars et juin 2014 l’ont été suite aux conflits intercommunautaires, notamment entre les Luba et les pygmées, dans les territoires de Kabalo, Kalemie, Manono et Nyunzu.

Au Maniema, la reprise de contrôle de la quasi-totalité des territoires de Kabambare et de Punia par les Forces armées de la République démocratique du Congo a permis à 85 110 personnes déplacées à retourner chez elles au cours du premier semestre 2014, portant à environ 225 000 le nombre de personnes retournées depuis janvier 2013.

Par contre, entre avril et juin 2014, les attaques des miliciens Maï-Maï Yakutumba dans la zone de Masisi au Sud-Kivu et celles des miliciens Raja Mutomboki et Kem’s au Sud de Punia ont poussé près de 50 000 personnes à trouver refuge, notamment dans les territoires de Kabambare, Pangi et Punia. Fin juin 2014, on estimait à 165 225 personnes la population déplacée au Maniema, soit 7 615 personnes moins qu’à la fin du premier trimestre.

Le Sud-Kivu a, quant à lui, enregistré environ 48 000 nouveaux déplacés au cours du second trimestre 2014, portant à environ 567 000 sa population déplacée interne à la fin du mois de juin contre environ 518 000 en mars. La majorité de nouveaux déplacements - plus de 70% - a été enregistrée dans le territoire de Shabunda suite, d’une part, aux affrontements entre les FARDC et les miliciens Raïa Mutomboki dans la zone de Mulungu et de Kolula et, d’autre part, aux déplacements préventifs par crainte des exactions par les mêmes miliciens.

Cette province est celle qui a enregistré le plus de retours au cours de dix-huit derniers mois, environ 500 000 personnes. Ce qui traduit la volonté des déplacés de retourner chez eux dès qu’il y a des signes d’une certaine accalmie sécuritaire, affirme la Commissaire mouvement de population.

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