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Kasai Direct
8 mai 2011

Le paradis des autres

J’étais au parc de la ville ce matin avec Muenda Nende. Un endroit très calme avec ses étangs peuplés de poissons et des canards sauvages. Lorsqu’il fait beau, beaucoup de gens viennent y passer leur temps : lire un livre, tenir une petite causerie entre amis ou faire une petite promenade. Dommage qu’on n’y rencontre pas nos frères Congolais. Et pourtant, ils sont nombreux qui habitent dans le coin. Ils préfèrent plutôt passer toute la journée à regarder les vidéos des théâtres de chez-nous ou des concerts religieux devant leurs petits écrans. De toutes les façons, ce ne sont pas mes oignons, n’est-ce pas ?

Comme Muenda Nende voulait jouer au foot, je lui lançais une balle de tennis qu’il allait chercher en courant et me la ramener pour un autre lancement, ainsi de suite. C’est ça notre football à nous. Il n’y a ni gagnant, ni perdant, l’essentiel étant de jouir du beau temps. Ce n’est pas comme kuetu kua ba muana kudi bana basheta mayenga, banyinaabu basheta makuabu et où le soleil brille 360 jours par an !

Pendant que nous étions à notre jeu, une voix m’appelle par derrière. Je me retourne et me trouve, nez à nez, avec madame Petkova. Encore elle ! Elle vient vers moi d’un pas un peu pressé : « Je te cherche depuis une semaine ! » me dit-elle en guise de reproche. « Adi, ndikama-kama kayi adio ? » Je me dis intérieurement. Nous n’avons pas de contrat qui nous lie pour nous rencontrer chaque jour, tout de même !

« Tu as suivi les nouvelles sur l’arrestation d’Osama Ben Laden », me demande-t-elle sans attendre ma réponse.  « Oui et pourquoi ? », je lui demande pendant que je continue mon jeu avec mon chien. « Tous ces grands fous sont pareils !  Osama envoie des milliers et des milliers de jeunes se faire exploser avec des bombes. Il leur miroite un paradis où les attendent sept vierges pour la vie éternelle. Mais lorsqu’il a été attaqué, il est allé se cacher dans sa chambre comme un petit rat ! C’est sûr qu’il n’a même pas pu tirer ne fût-ce qu’une seule balle de son fusil qu’il s’amusait à exhiber. » Là, j’ai arrêté de jouer et l’ai regardée, surpris.

Où voulait-elle en venir, cette femme ? A côté de moi, Muenda Nende se met à me gronder, ou à gronder madame Petkova, je ne sais plus. Je lui réponds : « cela n’a plus d’importance puisqu’il est mort ». Alors, elle s’énerve de plus belle. « Tu te rappelles d’Öchalan, le leader du PKK ! Lui aussi a fait tuer beaucoup de jeunes Kurdes. Mais lorsqu’il a été arrêté, il s’est mis à demander la fin de la guerre contre les Turcs en échange de sa vie. Saddam Hussein a été attrapé dans un trou comme un rat et cherchait à « négocier » tandis que ses enfants sont morts, armes à la main. Et que dire de votre Laurent Gbagbo qui a transpiré comme un cochon quand il a été arrêté par les sauvages d’Ouattara? Ce sont tous des lâches, des froussards ! » Finalement, je me demande si elle n’a pas raison, madame Petkova. En effet, il est plus facile d’envoyer les autres à la mort pour une cause dont on n’est pas convaincu, soi-même !

La colère de Muenda Nende monte encore d’un cran. Je ne peux plus la supporter. Après tout, je le comprends, Muenda Nende. Lorsqu’on est dans un parc, c’est pour profiter du beau temps et non discuter des choses qui ne nous concernent pas.  « Mais moi, je connais un qui a souffert et est mort sans peur. » lui ai-je lancé.  Avant que j’aie terminé le fonds de ma pensée, elle me crie : « Tu veux parler de Patrice Emery Lumumba ? ». Oh la la !!! Elle ne finira jamais de m’étonner, cette femme. Alors, fier comme un paon, je lui dis au revoir et rentre à la maison avec Muenda Nende.

Tshiamba ya Bende

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